Le sucre est-il bon pour la santé ?

La recette du cheesecake américain

Je vous ai menti. Si j’ai quitté ma famille, mon métier et mes amis, ce n’est pas dans l’optique d’offrir un physicien formidable aux américains. Non, la vraie raison, c’est le cheesecake.

Depuis toujours, je raffole de cette délicate pâtisserie au fromage Philadelphia. Je ne saurais me rappeler mon premier cheesecake, qui fut probablement un ersatz français confectionné avec du Saint-Môret. Jusqu’à récemment, le Philadelphia n’était pas commercialisé en France et déguster un authentique cheesecake, relevait de l’utopie. C’est de cette manière que j’ai développé une addiction au Saint-Môret et une obsession pour le cheesecake américain. Ainsi, ledit mari physicien, n’a même pas cherché à me vendre les mérites du laboratoire de physique afin de m’appâter. Il a seulement évoqué la Cheesecake Factory. Comment un tel endroit existait-il sans que je ne le connaisse déjà ? Pourquoi, pourquoi la physique ravissait-elle la vedette au cheesecake en matière de choix d’expatriation ? À mon sens, c’est exactement le même problème que Trump qui se croit plus important que le double-double. Bref, chacun a ses priorités.

Quand l’homme a mentionné la Cheesecake Factory, j’ai enfin su ce que c’était d’avoir la Foi : les musulmans avaient leurs mosquées, les catholiques leurs églises. Moi, j’aurais la Cheesecake Factory.

Lorsque je l’ai aperçue, elle ne payait pas de mine, coincée entre Macy’s et le parking de Target. Je ne me suis pas laissée impressionner pour autant, car maman m’a toujours dit que « l’habit ne faisait pas le moine ».

À l’intérieur du sanctuaire

L’intérieur, même s’il ne possède ni vitraux, ni autel, se drape d’une lumière divine. Je me saisis fébrilement du menu : je suis prête à déguster le corps du Christ.

Je me sens comme une enfant qui feuillète le catalogue de La grande récré, contrariée tout de même, d’être soumise au choix. Et si je prenais le cheesecake au Snickers ? L’homme me regarde, horrifié :

– Tu vas te retrouver avec du diabète, des caries. C’est cher le dentiste ici. La physique au moins, ce n’est pas plein de sucres, même aux USA.

Je lui ai souri, j’ai enfilé ma mine qui fait des concessions et j’ai déclaré :

– Bon et bien, je vais prendre le « White Chocolate Chunk Cheesecake Swirled with Macadamia Nuts and Caramel, on a Blonde Brownie Crust ».

Ceux qui me connaissent peuvent en témoigner, j’éprouve des difficultés à faire des concessions. J’ai été élevée à coup de « une fois n’est pas coutume », j’en ai fait mon mantra.

J’attends fébrilement mon gâteau, les yeux emplis d’étoiles. Je bave tel un Saint-Bernard devant sa gamelle pleine, j’ai tellement désiré ce moment.

Et enfin, il arrive dans sa robe de caramel et son chocolat blanc par millier.

Vais-je enfin rencontrer ce Dieu que j’attends depuis toujours ? J’attrape la cuillère. Je dois me faire violence pour ne pas plonger mes doigts directement dans le frosting.

Première impression, touchée par la graisse. La grâce, pardon.

Quelques pelletées plus tard, c’est quand même un peu sucré, j’avoue.

Après avoir terminé la chantilly et attaqué la croûte de Macadamia, je me sens toute chose.

–  Chéri, que penses-tu du cheesecake ?

Pas de réponse, chéri exhale le sucre.

Nous finissons la bête dans un hallali silencieux. Nous nous levons ensuite, le cœur léger et le ventre lourd.

Apothéose post-prandiale

Sur le chemin du retour, j’ai le cœur au bord des lèvres. Un souvenir me revient : le test de glucose. Ce test proposé à la femme enceinte pour détecter le diabète gestationnel. Il faut alors ingurgiter une dose monstrueuse de sucre et affronter une sensation caractérisée par un mélange d’écœurement, de nausées et de vertige. J’en suis là.

Mon mari ne parle toujours pas. Les hommes n’ont pas d’entrainement préalable au glucose. Je redoute le coma diabétique, post cheesecake.

De retour la maison, je m’assure qu’il est vivant et je suis frappée par une évidence :  C’est moche à voir, mais nous sommes malades.

D’un commun accord, nous mettons notre fils à l’isolement. Il regardera la Pat’ Patrouille et tant pis s’il perd quelques points de QI. Quant à nous, nous irons nous échouer sur notre matelas, car si vous avez bien suivi, nous n’avons pas encore de lit.

3 h après ingestion : Nous sommes toujours vivants, mais plus pour longtemps. La bassine danse devant nous d’un air moqueur. Pire, je l’entends mettre en doute mes convictions religieuses. 

4 h après : C’est l’hypoglycémie. Nous sommes blancs comme des linges, à deux doigts de suivre la lumière qui nous appelle vers cet enfer bien mérité.

L’antidote

Dans un dernier soubresaut, je supplie l’homme :

– Sauve-nous, si tu m’aimes, chéri, fais-moi des nouilles !

L’Italie et les sucres lents règneront un jour sur le monde, c’est sûr.

Nous voilà donc attablés à manger des pâtes pour compenser la baisse fulgurante de tous ces glucides.

Quelques minutes plus tard, nous constatons que nous avons survécu. Avec des séquelles. Je n’ai jamais pu retourner à la Cheesecake Factory. Je souffre d’un syndrome de stress post traumatique. Je fais beaucoup de cauchemars dans lesquels je suis poursuivie par un cheesecake en forme de Pac-Man qui tente de m’avaler. Les interrogations m’assaillent sans relâche. Etait-ce une punition divine pour avoir osé me détourner de Dieu ? Aurais-je dû choisir de m’expatrier plutôt en Italie ? 

La suite au prochain épisode, et si vous aimez mon article et le cheesecake, n’oubliez pas de me partager !



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